Loi LE MEUR

13/11/2025

Limitation des Locations Meublées de Tourisme par la Loi Le Meur

Présentation de la Loi :

La loi Le Meur, prévue pour entrer en vigueur le 18 février 2025, vise à réglementer davantage les locations meublées de tourisme, telles que celles proposées par des plateformes comme Airbnb et Abritel. Cette initiative a pour objectif de répondre à une préoccupation croissante concernant la diminution des logements destinés à la résidence principale.

Dans le cadre de cette loi, une interdiction totale des locations meublées de tourisme peut être stipulée lors de la mise en copropriété d'un bâtiment. Toutefois, si aucune interdiction totale n'est adoptée lors de cette mise en copropriété, il sera possible de limiter ces locations sous certaines conditions.

Loi Le Meur (18 février 2025) : limitation des locations meublées de tourisme en copropriété

I. Présentation générale de la loi

La loi Le Meur, adoptée le 18 février 2025, s'inscrit dans la continuité des dispositifs visant à réguler les locations meublées de tourisme (notamment via des plateformes telles qu'Airbnb, Abritel, etc.).
Elle répond à une préoccupation croissante : la raréfaction du logement à usage de résidence principale, accentuée par le développement massif des locations de courte durée dans les grandes agglomérations et les zones tendues.

Cette loi introduit, au sein du régime de la copropriété, de nouvelles facultés permettant de limiter ou d'interdire ces locations, sous réserve de conditions strictement définies.

II. Le nouveau cadre juridique : l'article 26 D de la loi du 10 juillet 1965

La loi du 19 novembre 2024 a modifié l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.
Un nouvel alinéa d) a été ajouté, permettant à l'assemblée générale de modifier le règlement de copropriété à la majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix pour :

« Interdire la location des lots à usage d'habitation autres que ceux constituant une résidence principale […] en meublés de tourisme au sens du I de l'article L.324-1-1 du code du tourisme. »

Cette modification n'est possible que dans les copropriétés dont le règlement interdit déjà toute activité commerciale dans les lots concernés.

Ainsi, la destination de l'immeuble devient un élément déterminant pour apprécier la validité d'une clause restrictive.

III. Condition préalable : la prohibition de toute activité commerciale

Le principal atout du dispositif réside dans son effet automatique, sous réserve du respect d'une condition préalable :
le règlement de copropriété doit interdire expressément toute activité commerciale dans les lots à usage d'habitation.

Sont donc concernées les copropriétés dont la destination est formulée de manière restrictive, telles que :

  • « habitation exclusivement bourgeoise » ;

  • « habitation bourgeoise » ;

  • « habitation résidentielle exclusive ».

Dans ces immeubles, l'adoption d'une clause limitative ou prohibitive des meublés de tourisme bénéficie d'une sécurité juridique renforcée, dès lors que la modification est adoptée dans les formes prescrites.

IV. Portée de l'interdiction pour les lots d'habitation

La loi Le Meur distingue clairement la résidence principale des autres formes d'occupation.

Seuls les lots occupés à titre de résidence principale peuvent continuer à faire l'objet de locations meublées de tourisme occasionnelles.

En conséquence :

  • L'exploitation régulière, continue ou systématique de logements en meublé de tourisme devient interdite dans les lots à usage d'habitation ou professionnel.

  • Les résidences secondaires ou les logements à usage non principal ne peuvent plus faire l'objet d'une activité de location saisonnière, même ponctuelle.

Ce dispositif vise à préserver la destination résidentielle des immeubles et à garantir la cohérence d'usage entre les différents lots.

V. Les incertitudes juridiques soulevées par la réforme

1. La question des droits acquis

La loi ne précise pas le régime applicable aux copropriétaires ayant exercé, de manière continue et ancienne, une activité de location meublée de tourisme.
Ces derniers pourraient invoquer un droit acquis, voire une atteinte disproportionnée au droit de propriété, si une interdiction venait rétroactivement remettre en cause une situation d'exploitation régulière.

A ce jour, le Conseil constitutionnel n'a pas été saisi de la conformité de cette disposition à la Constitution, laissant subsister une zone d'incertitude.

2. La notion de destination : approche contractuelle et factuelle

L'article 26 D fait expressément référence à la destination définie dans le règlement de copropriété.
Or, en jurisprudence, la destination d'un immeuble est à la fois contractuelle et factuelle.
Ainsi, un usage toléré de longue date, même contraire à la lettre du règlement, pourrait être invoqué pour contester la validité d'une interdiction nouvelle.

Cette dualité impose une analyse au cas par cas, fondée sur les éléments contractuels, mais aussi sur la pratique effective au sein de la copropriété.

3. L'aménagement possible de l'interdiction

Le texte paraît instaurer une alternative binaire : autorisation ou interdiction des locations de meublés de tourisme.
Il ne prévoit aucun aménagement intermédiaire (par exemple, limitation à un nombre de nuitées ou à certaines périodes de l'année).

Toutefois, le règlement de copropriété demeurant un acte contractuel, il n'est pas exclu que les copropriétaires puissent adapter la portée de l'interdiction par des clauses spécifiques, sous réserve de leur compatibilité avec la loi et la destination de l'immeuble.

VI. Conclusion

La loi Le Meur consacre un renforcement significatif des pouvoirs de la copropriété face à la prolifération des locations meublées de tourisme.
Elle permet une protection accrue de la destination résidentielle des immeubles, mais soulève en parallèle plusieurs questions d'interprétation relatives aux droits acquis, à la notion de destination et aux modalités d'application.

Dans l'attente de précisions jurisprudentielles, il est fortement recommandé aux syndics, conseils syndicaux et copropriétaires de :

  • vérifier la destination prévue par leur règlement de copropriété,

  • analyser les pratiques existantes au sein de l'immeuble,

  • et envisager, le cas échéant, une modification encadrée du règlement, dans le respect des nouvelles dispositions légales.

Points essentiels à retenir

  • La loi Le Meur (18 février 2025) modifie l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965.

  • L'interdiction des meublés de tourisme est possible à la majorité des 2/3, sous condition d'une destination non commerciale.

  • Seules les résidences principales peuvent être louées à titre de meublé de tourisme.

  • Des incertitudes demeurent concernant les droits acquis, la destination et les aménagements contractuels possibles.